« La vocation de l’homme est de devenir un être humain ; donc, le problème des problèmes c’est l’homme. » Dimanche dernier, à l’occasion de la journée mondiale pour les vocations dans l’Église, je repensais à cette parole de Maurice Zundel, théologien suisse, né à la toute fin du 19e siècle et mort en 1975, autant penseur de l’éthique que de la mystique.
La vocation n’est pas un appel d’un directeur des ressources humaines, ou un message sur un réseau social, pas plus que tombé du ciel sur la tête. Chaque humain est une vocation. Il est une vocation car il est appel pour les autres. Appel à le reconnaître, à le considérer, l’estimer, le soutenir. Il est un appel à la dignité. Appel à le reconnaître comme un homme, une femme. Convocation à devenir un humain en face et en faveur de l’autre, de tout autre. Oui, chacun est bien une vocation qui implore nos mœurs afin qu’ils deviennent moins injustes et brutaux.
Toutes nos relations, des plus ordinaires au plus essentielles pour chacun de nous sont alors comme une vocation à être un témoin d’humanité. Du creux de nos différences de générations, de sensibilités, de cultures ou de religions. En écrivant ces lignes, je pense à une sœur très âgée – près de 98 ans – de ma congrégation et qui vient de mourir. La longue fin de la vie de cette très vieille et grande dame a invité pacifiquement, et silencieusement à la toute fin, celles et ceux qui l’entouraient à répondre de sa vie, de sa haute dignité, de sa place encore en ce monde. Chacun a accompli sa vocation d’humanité en étant là, présence agissante, fraternelle, amicale, bienveillante, contemplative même.
Accueillir, faire silence, toucher, partager, converser, sans jamais menacer l’intégrité de l’autre. Aimer la liberté de l’autre, y compris parfois bien mystérieuse. Ma vocation c’est d’être appelé à exister, à prendre ma place en ce monde, en mon Église. C’est être appelé à faire advenir à ma mesure un peu plus d’hospitalité et de bienveillance.
Croyants ou non, d’une religion ou non, cette primordiale vocation nous est commune. Nos chemins singuliers, la façon dont nous tentons de faire l’unité de notre existence, de lui offrir un cap, un orient, toutes ces aventures sont justes dans la mesure où elles accomplissent cet appel à la « vocation médicale de l’homme », pour reprendre cette fois cette magnifique définition proposée par E. Lévinas.
L’homme est un candidat à l’humanité. « Me voici » est alors cette parole qui sauve et nous fait devenir nous-mêmes.
Sr Nadine TENACE